Charles-Alexandre de Richery (16 mai 1823 - transféré le 8 février 1829 à l’archevêché d’Aix-Arles-Embrun).
Blason : de gueules à l'oiseau d'argent posé sur un globe du même, au chef cousu d'azur chargé de trois étoiles d'or et soutenu d'une tringle d'argent
Charles-Alexandre de Richery naquit le 31 juillet 1759 au château d’Allons, dans le diocèse de Senez et fut baptisé le même jour.
La famille de Richery était originaire d’Italie. Le premier de ses ancêtres qui vint s’établir en France, Jacques Riccieri ou Richeri était fils de Louis-Coelius, né à Rovigo vers 1450 ; il s’établit à Saint-Maximin dont il devint viguier et capitaine pour le roi. La famille y demeurera jusqu’à la fin du XVIIIème siècle où elle occupa à plusieurs reprises les fonctions de maire et de premier consul. Quatre générations plus tard, Jean-Annibal de Richery (dont le cousin germain, Jacques de Richery, était chanoine théologal de Lorgues) fut nommé juge royal en 1676, viguier et subdélégué de l’Intendant de Provence, il avait épousé Claire d'Aguillon d’Allons, décédée en 1706 qui lui apporta le titre de co-seigneur d’Allons et du Bourguet. C’est dans le premier de ces villages que, devenu veuf, il se fixa vers 1715 et mourut en 1727. Ainsi s’établit la branche d’Allons ; son fils aîné, François, épousa en 1723 Ursule d’Henri de la Mothière. Deux de leurs quatre enfants arrivés à l'âge adulte entrèrent dans les ordres : Charles-François, chanoine d’Amiens qui fut le parrain de notre évêque, et son frère, Tranquille, prévôt de Glandèves, qui le baptisa ; leur frère aîné Jean-Louis-Alexandre, né en 1724, capitaine de cavalerie dans le régiment d'Aquitaine, participa à la bataille de Fontenoy le 11 mai 1745 et épousa le 4 septembre 1754 Lucrèce-Marguerite de Grasse de laquelle naquirent Joseph (l’"amiral Richery"), notre Charles-Alexandre, Baptistine, qui épousa le baron de Saint-Sylvestre, et Ursule qui, célibataire, accompagnera son frère évêque et mourut à Aix.
Charles-Alexandre étudia d’abord auprès de son oncle, chanoine de Senez, et fut tonsuré le 19 décembre 1773. Après de bonnes études au collège des Oratoriens d’Aix, entré ensuite au séminaire de Saint-Sulpice, Charles-Alexandre y reçoit les ordres excepté la prêtrise, qui lui est conférée le 5 avril 1783 (ou 19 février 1785) à Aix, par l’évêque de Senez qui lui donnera le titre de vicaire général quelques jours plus tard. Il était en outre détenteur d’un canonicat de la cathédrale d’Aix depuis 1780 (ou 1784). Croyant déceler en lui une vocation monastique, il entra alors à la Trappe que sa santé fragile l’obligera bientôt à abandonner pour se voir nommer grand-vicaire de Mgr de Bonneval, évêque de Senez. C’est là qu’il affronta la Révolution française. Avec son évêque, il dut prendre le chemin de l’exil : il séjourna quelques temps à Puget-Rostang chez des parents, puis à Nice et, de là, se rendit à Rome où il accompagnait souvent Mgr de Bonneval, dans l’entourage du futur cardinal Maury ; il y côtoya Mesdames Adélaïde et Victoire de France. A l’occupation de Rome par les troupes françaises il se réfugia dans différentes villes d’Italie et revint dans sa patrie en 1801 où, retiré dans sa famille, il ne voulut accepter aucune fonction d’un gouvernement usurpateur.
Les sentiments monarchistes de l’abbé de Richery, qui lui feront conclure plus tard chacune de ses interventions publiques par le cri de « Vive le roi ! » furent sollicités le 11 décembre 1814, lorsqu’une frégate rebaptisée la Fleur de lys, accosta à Toulon pour y apporter les dépouilles des deux filles de Louis XV connues à Rome et décédées à Trieste ; on les déposa le 20 dans un caveau de la chapelle Saint-Joseph de l’ancienne cathédrale Notre-Dame de la Seds jusqu’au 7 janvier 1817, jour où elles repartirent pour la basilique de Saint-Denis qui les accueillit le 20 janvier ; les accompagnaient Mgr Etienne des Galois de La Tour, ancien aumônier des princesses (qui sera nommé la même année archevêque de Bourges), l’abbé Jean-Baptiste Vigne, curé de Toulon, et l’abbé de Richery. Ce fut pour lui l’occasion d’être présenté au roi ; il en reçut quelques mois plus tard sa nomination au siège de Fréjus.
En effet, un concordat fut signé le 11 juin de cette année qui prévoyait le retour partiel à celui de Bologne et le rétablissement d’un certain nombre de sièges supprimés en 1801. La nouvelle circonscription ecclésiastique fut promulguée par la bulle Commissa divinitus le 27 juillet 1817 et le roi « nommait » le 8 août suivant toute une série de prélats dont Mgr de Richery au siège restauré de Fréjus, la confirmation romaine leur fut accordée au consistoire du 1er octobre.
Immédiatement, l’abbé de Richery, de son château d’Eoulx où il résidait, avait pris des contacts, répondu aux premières sollicitations et s’était préparé à un ministère qui l’inquiétait. Les évènements lui concédèrent un répit ... de six ans.
En effet, on s’aperçut un peu tard que ce type de traité ne pouvait se passer d’être entériné par les Chambres à l’instar d’une loi aux conséquences administratives internes. Ce fut l’occasion de redonner de la voix à un gallicanisme qu’on avait peut-être cru trop tôt vaincu. L’affrontement entre Rome et Paris fit alors tout suspendre et Pie VII annonça le 23 août 1818 qu’il préférait en rester provisoirement aux termes du concordat de 1801. Il faudra de nouvelles négociations pour que le pape accorde à la France, le 6 octobre 1822, une trentaine de nouveaux sièges, avec la bulle Paternae charitatis publiée par l’ordonnance du 31 octobre suivant.
Sur la base d’une nomination en date du 10 avril 1823, les nouvelles bulles de préconisation furent signées le 16 mai 1823 ; Mgr de Richery fut sacré le 20 juillet suivant dans l’église des Missions Etrangères, à Paris, par le neveu de son prédécesseur, Mgr Pierre-François de Bausset-Roquefort, archevêque d’Aix assisté de Mgr François-Antoine Arbaud, évêque de Gap et de Mgr Fortuné de Mazenod, évêque de Marseille qui venaient tous les deux d’être consacrés le 6 juillet dans la même cérémonie. Le 23 juillet il signe une procuration au profit de l’abbé André Saurin, curé de la cathédrale de Fréjus, afin qu’il prenne possession du siège en son nom, ce qui sera fait le 3 août suivant. Mgr de Richery fit son entrée dans sa ville épiscopale le 1er octobre 1823, et quelques semaines plus tard à Toulon (le 15 janvier 1824), désormais réuni à Fréjus.
Après trente années de vacance du siège, tout était à refaire.
Son premier souci fut le séminaire : dès le 14 octobre il écrit au préfet : « c’est le plus pressant et le plus cher de mes vœux. Il est essentiel, il est indispensable pour le bien du diocèse que l’ouverture s’en fasse dès cette année. ». Et le 30 novembre 1823, dans l’ancien édifice construit en 1776, il peut rouvrir le séminaire fondé en 1677 par Mgr de Clermont-Tonnerre et fermé à la Révolution ; Mgr de Richery le place sous le vocable de l’Immaculée Conception et en confie la direction à l'abbé Maunier qui l'assumera jusqu'à sa mort en 1844. Emmanuel-Fréjus Maunier, fils de l'adjoint au maire de l'époque, était né à Fréjus en 1769 ; après s'être marié très jeune, il avait perdu en quelques mois sa fille et son épouse et s'était alors orienté vers la prêtrise qu'il reçut dans la clandestinité à Marseille des mains de l'évêque de Grasse, l'année 1797, en pleine révolution ; il fut ensuite un des cinq premiers compagnons de saint Eugène de Mazenod et s'engagea dans la nouvelle Société qu'il venait de fonder. La création du diocèse de Fréjus nécessitait des forces vives et Mgr de Richery ne craint pas de faire appel à tous les prêtres originaires du diocèse en les relevant de leurs voeux le cas échéant et en leur offrant des postes de responsabilité. C'est ainsi que les Pères Maunier et Deblieu (originaire de Brignoles) quittèrent la Société des Missionnaires de Provence qu'ils avaient contribué à établir, au grand scandale d'Eugène de Mazenod qui, tout en vantant la douceur et la charité de celui qu'il appelait le "saint abbé Maunier", regrettait une extrême susceptibilité, "malgré toute sa vertu".
Mgr de Richery voulut que ce même jour du dimanche 30 novembre 1823, soit célébrée, avec la première promotion de chanoines, la reconstitution du chapitre détruit par les lois de 1789 et pour la renaissance duquel l’autorisation royale venait de lui parvenir. C'est alors que l'abbé Maunier reçut le titre de chanoine honoraire, qui sera également accordé quelques années plus tard à son ancien confrère, le vigoureux missionnaire Sébastien Deblieu.
Les bâtiments aussi étaient à remettre en état : la cathédrale qui avait besoin de travaux, mais aussi l’évêché qui ne sera inauguré que pour l’arrivée de Mgr Michel ; en attendant Mgr de Richery se contenta de la « maison aux atlantes » mise à sa disposition.
Le 1er décembre 1824, il publia des instructions pour ses prêtres. Il travailla à la création d’un petit séminaire à Brignoles, qui ouvrit ses portes le 15 octobre 1825. Il visita avec soin les paroisses de son diocèse avec une tournée pastorale qui dura cinq ans et lui gagna les cœurs. Le 1er décembre 1827 il posait la première pierre du nouvel hôpital de Fréjus. Mais surtout, il se distingua par une charité très active auprès des plus pauvres, qui savaient sa porte toujours ouverte pour eux : ce fut là sa qualité distinctive tant à Fréjus qu’à Aix où il fut appelé après la mort de l’archevêque qui l’avait consacré.
Malgré ses réticences il y fut transféré par nomination du 8 février 1829 confirmée le 27 juillet 1829. Il fut installé le 12 septembre 1829 sur le siège métropolitain. La semaine suivante (le 21 septembre), il sacrait Mgr Michel, son successeur à Fréjus. Aix eut le temps d’expérimenter sa charité, mais la révolution de 1830 l’affecta considérablement et il mourut soudainement le 25 novembre 1830. Il fut inhumé dans un caveau de la cathédrale d’Aix.
Ses armes comportent une décoration suspendue à un ruban, c’est la même qu’il arbore sur le portrait conservé à la cathédrale de Fréjus. Il s’agit de la croix du chapitre d’Aix ainsi décrite : « Par brevet du 12 décembre 1779, suivi de lettres patentes du 3 janvier d'après, le roi Louis XVI permit aux vingt, tant dignitaires que chanoines du chapitre d'Aix, ainsi qu'à leurs successeurs à perpétuité, de porter une croix d'or émaillée, à huit pointes égales ornées de fleurs de lys d'or, une dans chaque angle, sur le médaillon de laquelle croix était représentée la transfiguration de Notre-Sauveur à qui l'église d'Aix est dédiée avec cette légende : Antiqua sine lege nobilitas ; et sur le revers se trouvait la représentation de la façade de ladite église, avec cette devise, venerabilis ecclesia Aquensis ; cette croix était suspendue à un ruban moiré de couleur bleue etc. » Ce n’est qu’à la fin du XVIIIème siècle (outre Lyon qui en bénéficia dès 1748) que le privilège de la croix pectorale avait été concédé par le souverain aux chanoines et encore, qu’à seuls huit chapitres cathédraux de France parmi les plus insignes. A l’exemple des décorations civiles, une réduction pouvait être portée sur l’habit de ville. Fiers de cette rare distinction, les anciens chanoines de Saint-Sauveur qui vivaient encore, reprirent à la quasi unanimité la croix et le ruban bleu sous la Restauration. Selon un usage de l’Ancien Régime certains évêques du XIXème siècle tinrent à porter la croix capitulaire en tant que premier chanoine de leur diocèse, comme en témoigne le portrait de Mgr Terris peint par Bérengier où les deux croix pectorales se superposent...