Frédéric-Henri Oury (2 mars 1886, transféré le 3 juin 1890 au siège de Dijon).
Blason : taillé cousu de gueules à la croix latine d'or, et d’azur à l’ancre d'argent
Devise : Utrique fidelis.
Né à Vendôme le 3 mai 1842, fils de René Oury et Catherine Barbet, après des études au collège de Blois puis de Précigné, Frédéric Oury entra au séminaire du Mans et fut ordonné prêtre pour ce diocèse le 23 septembre 1865. Il fut un temps vicaire à la Ferté-Bernard. Devenu en 1869 aumônier dans la marine, il servit pendant seize ans presque sur toutes les mers du globe : on le trouve sur la corvette cuirassée « Jeanne d’Arc », puis deux ans en Indochine avec les troupes à terre, quelques mois aumônier de l’hôpital de Saint-Mandrier, en 1884 aumônier de l’Ecole navale sur le « Borda ». Il y gagne la Légion d’honneur et bientôt sa nomination comme évêque de Guadeloupe et Basse-Terre le 31 décembre 1884, confirmée le 27 mars suivant. Plus jeune évêque de France, il est consacré le 21 juin 1885 dans la cathédrale du Mans par trois futurs cardinaux Mgr Guilbert, assisté de Mgr Couillié et de Mgr Labouré.
Mais des difficultés budgétaires empêchèrent son installation et provoquèrent son transfert à Fréjus où il est nommé le 2 mars 1886, il est confirmé le 10 juin et installé seulement le 16 septembre.
Le 28 août, la Semaine religieuse de Fréjus écrivait : « Ce retard surprenant provient uniquement des formalités que la Nonciature apostolique doit accomplir pour opérer la disjonction de l’arrondissement de Grasse d’avec le diocèse de Fréjus et l’annexion de cette région au diocèse de Nice. Nous n’avons jamais parlé de cet événement que nous redoutions depuis longtemps et qui est aujourd’hui définitivement décrété. ». En effet, il avait fallu plus d’un an pour pourvoir au remplacement de Mgr Terris. Profitant de la vacance du siège, le gouvernement avait du faire vite cependant pour mener à terme ce projet auquel aussi bien Mgr Jordany que Mgr Terris n’avaient voulu consentir. Déjà en 1877, le choix du gouvernement pour le siège de Nice du chanoine Matthieu Balaïn OMI, vicaire général, et supérieur du Grand séminaire de Fréjus depuis 1857, avait été en partie motivé par cette entreprise qui visait à casser les aspirations sécessionnistes d’un clergé niçois jugé trop italianisant. On a vu comment l’administration jugeait Mgr Terris à cet égard. Rome accepta sans faire de difficulté la requête gouvernementale. La bulle de nomination de Mgr Oury comporte donc l’incorporation au diocèse de Nice de l’arrondissement de Grasse (avec ses trois anciennes villes épiscopales d’Antibes, de Grasse et de Vence), à l’exclusion du territoire de l’île Saint-Honorat. Deux jours après, le 12 juin, un décret présidentiel lui donna force de loi. Mais il fallut attendre la proclamation solennelle du décret consistorial à Nice par l’évêque de Marseille, comme délégué du nonce apostolique, le 1er septembre 1886, et son application, pour permettre à Mgr Oury de prendre possession d’un diocèse amoindri : cet acte fut célébré le 5 septembre en son nom par le chanoine Laugier, vicaire capitulaire.
Le nouveau promu, à qui l’on trouve un « port dégagé » et des « allures militaires », fait son entrée à Fréjus le 16 septembre et dans la cathédrale de Toulon dont il porte aussi le titre, le 1er octobre 1886.
Il fera un court séjour de quatre années seulement sur le siège de Fréjus où l’autorité républicaine le jugea beaucoup plus coopératif que ne l’avaient été Mgr Jordany et surtout Mgr Terris, le Préfet témoigne qu’il avait su « modérer les exaltés »...
Effectivement, Mgr Oury faisait partie de ces rares prélats français qui avaient su gagner les bonnes grâces de la Direction des cultes dans un climat de tension croissante entre l’Eglise et la République. On lit dans un rapport du Préfet daté du 8 juillet 1888 : « Le trait principal du caractère de ce prélat est un véritable esprit de conciliation, soit au point de vue personnel, soit au point de vue administratif... Très courtois, d’une bienveillance plus humaine que religieuse, c’est là son côté original, Mgr Oury évite avec soin les petites difficultés et tout ce qui peut ressembler à une opposition mesquine et systématique. Il défend ses prêtres lorsqu’ils sont attaqués ; mais il le fait avec tact et mesure, comme un chef de service et non comme une puissance ennemie... Il garde en politique la neutralité la plus absolue, il est plus correct que bien des fonctionnaires civils. A mon avis, il est sur la limite extrême des bonnes relations qu’un évêque peut avoir avec l’administration sans être critiqué par son clergé dont quelques membres d’humeur militante le traitent d’opportuniste. ». On comprend pourquoi (« Utrique fidelis »...) c’est lui qui fut choisi pour entériner la soustraction de l’arrondissement de Grasse et pourquoi dès la mort de l’archevêque de Bordeaux, le cardinal Guilbert en août 1889, son nom sortit encore dans un jeu complexe de nominations au cours de négociations serrées entre la nonciature et le gouvernement, qui l’aurait bien vu à Chartres.
Pendant ce temps, après avoir découvert son diocèse, béni le 14 avril 1887 l'église Notre-Dame-de-la-Victoire à Saint-Raphaël qui venait de sortir de terre, Mgr Oury accomplissait sa visite ad limina fin 1888 d’où il recevrait les titres de Prélat de la maison de Sa Sainteté, d’assistant au trône pontifical et de comte romain, ce qui semble devenu une habitude pour les évêques de Fréjus...
Les relations avec le séminaire semblent encore connaître quelques difficultés : à son arrivée à Fréjus, Mgr Oury fut prévenu contre le supérieur par son entourage. On lui reprochait de ne pas laisser aux élèves le choix de leur directeur spirituel, d'avoir aménagé la chapelle d'une façon luxueuse, de ne pas avoir approuvé quelques décisions du conseil épiscopal, etc. Le conseil général allait décider le remplacement du supérieur, le Père Rambert, lors qu'on apprit son décès le 12 juillet 1889. Les choses s’apaisèrent avec son successeur. Il s’employa cependant à assurer les ressources nécessaires qui désormais ne provenaient plus de l’Etat pour soutenir et le séminaire et les prêtres âgés du diocèse.
Le 25 octobre 1889, il prononça l’oraison funèbre de Mgr Jordany, son prédécesseur dans la cathédrale de Riez.
Les tractations se poursuivaient pour trouver un archevêque à Bordeaux : le conciliant Victor Lécot, pressenti, fit savoir que Mgr Oury était le prélat le plus à même de poursuivre sa politique à Dijon, pendant qu’arrivaient à la Direction des cultes les recommandations les plus élogieuses sur un certain vicaire général de Soissons. Le 1er juin l890 un courrier partait de la nonciature expliquant le risque qu’un refus de la part du Saint-Siège bloque pour longtemps le train de nominations, la réponse positive arrivait de Rome le 4, et le 6 juin 1890 le Journal Officiel publiait la nomination de Lécot à Bordeaux, d’Oury à Dijon (préconisé le 26 juin) et de Mignot à Fréjus.
Mgr Oury ne restera pas très longtemps non plus en Bourgogne puisqu’on le transfèrera encore à Alger dont il deviendra l’archevêque par nomination du 8 juillet 1898 et confirmation du 28 novembre suivant. Il ne se plut jamais à Alger où il avait été nommé contre l’avis du clergé local et où il rencontra de nombreuses difficultés qui le contraindront à présenter sa démission « pour raisons de santé » dès septembre 1905. Elle ne prit effet que le 15 décembre 1907. Le 29 avril 1909 il reçut le titre d’archevêque in partibus de Ptolemaïs de Thébaïde. D’abord retiré dans la petite commune de Conflans-sur-Anille, dans la Sarthe, il établit sa retraite dans la banlieue de Dijon où il passa ses dernières années. Il s’éteint à Marseille le 6 février 1921 à l’âge de 78 ans, dans la famille d’Henri Durand (frère de l’évêque d’Oran et neveu du doyen du chapitre de Fréjus, le chanoine Victor Durand) connue dans le Var, où il avait coutume de passer chaque hiver. Ses funérailles solennelles furent célébrées dans la cathédrale de Dijon. Mgr Oury était chanoine d'honneur du Mans depuis novembre 1886.
Durant son épiscopat de plus de 35 ans, il avait consacré évêques NN SS Jean-Baptiste Frérot, Pierre-Emile Rouard et François Maillet.