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Emmanuel-François de Bausset-Roquefort (6 août 1766 – dépose sa charge en 1801)image069

Blason : d'azur au chevron d'or, accompagné en chef de deux étoiles à six rais d'argent et en pointe d'un mont de même
Devise familiale : Sola salus servire Deo.

image071Emmanuel-François de Bausset-Roquefort naquit le 24 décembre 1731 à Marseille. (La famille de Bausset était établie près d'Aubagne depuis le XIV° siècle. Elle tînt la prévôté du chapitre de la Major de Marseille de 1570 à 1691. Le titre de marquis date de 1736). Il y fut baptisé le lendemain dans l’église Saint-Martin selon les registres de la paroisse : « Dudit jour, Emmanuel-François de Bausset de Roquefort, fils légitime de Mre Michel-Jean-Baptiste de Bausset Duchène, seigneur de Roquefort, et de dame Marie-Thérèze de Gantel-Guitton. Son parrain Mre François de Gantel-Guitton, sa marraine Marie-Anne de Cipières. Par nous, Susan, vicaire. ».
A peine fut-il prêtre que son oncle paternel, Mgr Joseph-BruBruno de Bausset Roquefortno de Bausset-Roquefort, évêque de Béziers, le fit chanoine et lui donna le titre de grand-vicaire. En 1757, il reçut en commende l’abbaye de Flaran (au diocèse d’Auch). Il obtint la licence en droit civil et droit canon et fut agent général du clergé, charge qui conduit d’ordinaire à l’épiscopat auquel il accéda à l’âge de trente-quatre ans, avec ses bulles de nomination à Fréjus en date du 6 août 1766. Il fut sacré le 31 août 1766 dans l’église Saint-Roch de Paris par Mgr Christophe de Beaumont, archevêque de Paris, assisté des évêques de Bourges et d’Orléans.
A Fréjus où il fit son entrée le 28 janvier 1767, il se montra actif et bon administrateur, s’occupant des secours aux pauvres, des détails du service religieux mais aussi de l’assainissement de la ville. Il s’employa à trouver des locaux assez spacieux pour développer son séminaire. Les consuls de Fréjus refusèrent de participer à l’entreprise, mais firent en même temps tout ce qui était en leur pouvoir pour retenir le séminaire dans leur ville : en effet, Mgr de Bausset-Roquefort avait songé un temps au palais de Mgr du Bellay à Draguignan, or il eut la surprise non seulement de voir l’ancien propriétaire s’y opposer mais rentrer de nouveau dans son bien pour le vendre à un particulier, au grand contentement des fréjusiens ! Sur la menace d’un procès, un accord fut trouvé et le nouvel évêque put enfin bâtir ce qui sera le grand séminaire de Fréjus pendant plus d’un siècle. La reconstruction fut achevée en 1776 et l’établissement, placé désormais sous le vocable de l’Immaculée Conception.
Mgr de Bausset-Roquefort fit le projet de recreuser l’antique port de Fréjus et de le relier à la mer par un chenal pour des raisons de salubrité et pour développer l’activité commerciale en présentant ses plans à l’assemblée provinciale de Lambesc en 1774. En 1779 le roi accorda une remise d’impositions et des aides financières « pour réduire la cause du mal » et « donner à la province et à l’Etat un nouveau port qui serait le plus utile de la Méditerranée après ceux de Toulon et de Marseille ». En 1782, contraint de réviser ses projets en faveur d’un assèchement du port, l’évêque abandonna « tous les droits qu’il pourrait avoir sur les étangs et marais de Fréjus » et des environs. Les travaux commencés furent définitivement stoppés par la Révolution.
image073Mgr de Bausset-Roquefort publia un nouveau bréviaire (dans une lettre du 22 avril 1780 il s'excusera d'en faire faire la réimpression à Paris plutôt que de l'avoir confiée à un imprimeur provençal) et un nouveau missel inspirés de la liturgie parisienne pour les substituer curieusement à ceux de la liturgie romaine alors en vigueur. Il offrit à sa cathédrale, en 1778, le splendide maître autel de marbre, aujourd’hui dans la chapelle du Saint-Sacrement, et qu’il fit placer en avant de l’ancien qui se situait au centre de l’abside. C’est encore Mgr de Bausset-Roquefort qui publia des ordonnances synodales et un catéchisme en 1779 dont il confia la rédaction à Jean-Baptiste Denans, supérieur du séminaire et vicaire général non dépourvu de sympathies gallicanes, ainsi que deux processionnaux, l’un pour sa cathédrale, l’autre pour son diocèse. Le dimanche 18 mai 1788 il consacra la collégiale Saint-Martin de Lorgues qui avait bénéficié de la munificence de son prédécesseur, le cardinal de Fleury.
Mgr de Bausset-Roquefort donna en 1769 un canonicat à l’un de ses cousins, Louis-François de Bausset-Roquefort, déjà chapelain à Vidauban, qui deviendra LF de Baussetévêque d’Alais et sera créé cardinal le 28 juillet 1817 ; après avoir ordonné prêtre en 1781 un de ses neveux, Pierre-Ferdinand de Bausset-Roquefort, il lui accorda le titre purement honorifique de vicaire général, c’est lui qui deviendra évêque de Vannes, puis archevêque d’Aix. Comme il sera vu plus bas avec Maurine, Mgr de Bausset-Roqueimage075Gros de Beplasfort ne fut pas heureux dans le choix de ses vicaires généraux parmi lesquels on compte le « philosophe » Joseph Gros de Besplas (oncle de Jean-Antoine Roucher, poète guillotiné avec son ami André Chénier) et le mondain Jean-Baptiste Florimond Meffray de Césarges.Le besoin d’argent que suscitaient ses nombreuses dépenses et peut-être aussi la perception qu’un monde était en train de passer, l’encouragea à abandonner plusieurs de ses privilèges : il vendit ainsi le château du Castellas à Agay avec ses droits seigneuriaux, les seigneuries des Esclans, de la Baume, de Bagnols, de Fayence et échoua à vendre celle du Puget, mais acheta le monastère de Sainte-Roseline déserté par les Observantins.
En l’absence du métropolitain, c’est lui qui présida avec dignité, comme plus ancien évêque de la province, la seconde session des Etats généraux du pays et comté de Provence en avril 1789, alors que les élections en vue des Etats généraux du royaume avaient déjà porté à la députation les membres les plus contestataires du bas clergé. Le samedi des Quatre-Temps de la Pentecôte (6 juin 1789) il procède à une ordination dans la chapelle du palais épiscopal d'Aix. 
On sait comment l’Assemblée nationale vota successivement la mise à la disposition de la nation des biens du clergé (2 novembre 1789), la suppression des ordres religieux et des vœux monastiques (13 février 1790) puis la constitution civile du clergé (12 juillet 1790).
C’est à Aix que Mgr de Bausset-Roquefort reçut (à la demande de celui du Var) la lettre du directoire départemental des Bouches-du-Rhône datée du 25 août 1790, lui demandant de prêter le serment et de devenir l’évêque constitutionnel du Var ; la municipalité de Fréjus et l'abbé François Maurine, curé et vicaire général, appuyaient ce projet. Mgr de Bausset répondit le 30 août en promettant de rentrer bientôt, retenu qu’il était par des épreuves familiales et des problèmes de santé.
Effectivement il arriva dans les premiers jours de septembre à Flassans, chez le prieur Gassier, lui aussi vicaire général ; le 18 septembre 1790 il y célébra l'ordination des Quatre Temps d'automne et ordonna deux prêtres : les abbés Honorat Auriol et Clément Seraillier. Ce fut son dernier acte épiscopal dans le diocèse de Fréjus.
Le directoire départemental de Toulon insista par lettre du 8 octobre pour que le prélat consentît à exercer ses fonctions dans tout le département en lui laissant huit jours pour répondre ; pressé de toutes parts, Mgr de Bausset répondit le 19 octobre par une missive portée par M. Gassier, dans laquelle il faisait remarquer que "Dieu lui ayant confié l'Eglise de Fréjus, il ne pouvait pas étendre sa juridiction hors des limites de son diocèse sans une mission expresse du souverain pontife, donnée sur la démission des titulaires qui existaient encore".
L’évêque avait naturellement bien compris qu’il ne s’agissait pas seulement de cautionner un redécoupage administratif au détriment des diocèses supprimés de Toulon, de Grasse et de Vence (sans compter quelques paroisses extraites de ceux d’Aix, Glandèves, Marseille, Riez et Senez) englobés dans la nouvelle circonscription, mais que l’enjeu était celui de l’autorité dans l’Eglise qu’à terme on voulait anéantir.
Le 22 octobre, le président du district écrivit encore à l'évêque une lettre personnelle pour le presser de venir organiser le clergé selon la loi nouvelle et accorder les dispenses que "les évêques supprimés refusaient de donner". L’évêque lui répondit encore : « Votre premier pasteur sexagénaire, chargé de vous instruire, vous apprend que celui qui commande aux Souverains me défend d’occuper une juridiction qu’il ne m’a pas donnée. » et développa son argumentation dans une longue épître envoyée le 3 novembre à son vicaire général, François Maurine, qui était acquis aux idées nouvelles, où il lui rappelait d'abord les canons 7 et 8 de la 23e session du Concile de Trente sur les pouvoirs d'ordre et de juridiction ; il lui ordonnait ensuite de répandre cette lettre dans tout le diocèse et d'en informer le second curé de Fréjus, l'abbé Joseph Héraud : "Pour moi, invariablement attaché à mon devoir, fidèle à la mission qui m'a été confiée, je veillerai sur mon troupeau, je lui distribuerai le pain de la parole, je m'efforcerai de le ramener aux principes de la véritable doctrine qu'on attaque avec un acharnement aussi impie que scandaleux. Malheur à moi si j'entreprenais de faire des fonctions épiscopales, d'exercer le moindre acte d'autorité dans un diocèse où l'Eglise ne m'a pas envoyé, où elle me défend sous les peines les plus sévères d'exercer les fonctions d'évêque... Je vous ordonne de lire cette lettre à votre confrère et à tous les prêtres approuvés de mon Eglise et de la répandre dans mon diocèse, autant qu'il sera possible, en faisant faire des copies. Je vous en fais un devoir de conscience... C'est principalement les prêtres que je dois instruire ; je me persuade qu'on travaille à leur faire illusion, et malheur à moi si je négligeais de les détromper. Vous serez mon organe en leur faisant part de cet exposé simple de la véritable doctrine. Je vous chéris, mon cher curé, en Jésus Christ. »
Mgr de Bausset, doutant de l'obéissance de Maurine, écrivit spécialement à tous les curés, en les exhortant à se "défier des faux prophètes et à rester fermes dans la foi et l'unité". Une nouvelle tentative faite par le district de Fréjus pour réduire le prélat à sa volonté valut à son diocèse sa touchante lettre d’adieu : « Je vous écris cette lettre, mes chers enfants, devant mon crucifix ; voilà mon guide, voilà mon conseil (...) Vous voudriez donc que je fusse un usurpateur, un schismatique, un ennemi de l’Eglise de Dieu ! Non, jamais je ne trahirai ni mon devoir ni ma conscience. ». Ces dernières lettres étaient déjà écrites d’exil puisque Mgr de Bausset, après s'être arrêté au domaine de Sainte Roseline, près des Arcs, qu’il avait récemment acquis, passa incognito à Fréjus et gagna la frontière du Var pour s’installer à Nice où il arriva le 29 octobre